Les travaux impliquant des matériaux amiantés apportent des problématiques particulières en matière de santé et de sécurité au travail. La manipulation de l’amiante nécessite une compréhension approfondie des risques et une application rigoureuse des procédures réglementaires. Découvrons ensemble les règles de base de la réglementation amiante pour mener à bien ces opérations.
Le risque amiante, à ne pas prendre à la légère
L’amiante est une cause majeure de mortalité liée aux maladies professionnelles. En effet, les opérateurs peuvent facilement inhaler des fibres d’amiante invisibles à l’œil nu. Elles s’incrustent dans les poumons et entraînent des risques à long terme.
L’amiante est classé comme substance cancérogène par le CIRC. Son absorption peut être à l’origine de maladies graves dont le cancer du poumon et le mésothéliome pleural.
Chaque année 1 100 cas de mésothéliomes sont déclarés et liés principalement à une exposition dans le cadre professionnel. Sur les 40 000 cas de cancers du poumon annuels, 10 à 15% seraient liés également à une exposition professionnelle à l’amiante.
De plus, le non-respect de la réglementation lors de travaux sur amiante engendre un risque juridique de mise en danger de la vie d’autrui.
L’amiante, un matériau très commun dans la construction
Le secteur du bâtiment utilisait largement l’amiante, notamment entre les années 1950 et 1990, pour ses propriétés : anti-incendie, résistance mécanique, isolant phonique, etc. Depuis le 1er janvier 1997, son usage est formellement interdit en France du fait de sa dangerosité révélée.
On le retrouve dans les flocages, les calorifuges, les dalles de sol, les toitures, les plaques de faux plafonds ainsi que dans les gaines techniques et les conduits de ventilation. L’amiante était très apprécié pour ses caractéristiques, ce qui en a fait un matériau de choix pour de nombreux éléments de construction.
Il était également présent dans les colles à carrelage, les enduits et certains revêtements de façades, rendant sa présence très courante dans les bâtiments anciens.
Repérage amiante avant travaux
Le repérage amiante avant travaux est une étape obligatoire et cruciale pour garantir la sécurité des intervenants et des occupants.
Il consiste à identifier les matériaux ou produits susceptibles de contenir de l’amiante afin de planifier les mesures de prévention adéquates. Cette opération doit être confiée à un opérateur de repérage compétent, disposant d’une certification amiante.
Le repérage permet ainsi de limiter le risque d’exposition involontaire des travailleurs lors du retrait de dalles de sol, d’éléments d’isolation ou d’autres matériaux de construction susceptibles de libérer des fibres d’amiante.
Le repérage doit être systématiquement réalisé, sauf dans quelques rares exceptions :
- Lorsque les travaux doivent être effectués de manière urgente en raison d’un risque imminent pour la salubrité publique, la sécurité des personnes ou des biens.
- Lorsque l’opération de repérage présente un risque trop élevé pour le diagnostiqueur, par exemple en cas de danger d’effondrement.
- Lorsque l’opération relève de la sous-section 4 et du premier niveau d’empoussièrement, c’est-à-dire des interventions de faible ampleur sur des matériaux amiantés.
Dans ces cas spécifiques, le repérage n’est pas obligatoire, mais des mesures de prévention strictes doivent être appliquées.
Les intervenants doivent travailler comme s’il y avait présence d’amiante, en utilisant des équipements de protection individuelle adaptés : masques filtrants, combinaisons jetables et protection des surfaces environnantes pour éviter la contamination croisée. Ces précautions permettent de minimiser les risques pour les travailleurs et les occupants.
Définir la catégorie des travaux : sous-section 3 ou sous-section 4
La réglementation distingue deux types de travaux :
- Sous-section 3 (SS3) : Pour les travaux de retrait ou d’encapsulation d’amiante. Par exemple, un chantier de désamiantage complet.
- Sous-section 4 (SS4) : Pour les interventions plus limitées sur des matériaux amiantés comme percer un mur contenant de l’amiante.
Il est indispensable de caractériser la sous-section dans laquelle on intervient. En effet, la catégorie des travaux va définir le type d’entreprise qui est habilitée à intervenir.
Par exemple, les travaux relevant de la sous-section 3 doivent être réalisés par une entreprise certifiée pour le retrait d’amiante. Elle possède les compétences et qualifications nécessaires pour assurer la sécurité des travailleurs et la conformité des travaux.
Déterminer correctement la sous-section des travaux est essentiel. Cela influe directement sur les mesures de protection à mettre en place, les équipements nécessaires et le niveau de formation exigé pour les intervenants.
En sous-section 3, les travaux sont soumis à des procédures plus strictes, incluant la mise en place de confinements étanches, des contrôles réguliers de l’empoussièrement ainsi que l’utilisation d’équipements de protection individuelle (EPI) spécifiques, tels que des combinaisons jetables à usage unique et des appareils respiratoires adaptés.
Pour les travaux de sous-section 4, les exigences restent importantes, mais elles sont adaptées à la nature limitée de l’intervention. Par exemple, percer un mur contenant de l’amiante peut sembler moins invasif qu’un retrait complet, mais cela n’enlève rien à la dangerosité potentielle des fibres libérées. Ainsi, même pour des travaux de moindre envergure, il est impératif de respecter les mesures de sécurité, telles que l’utilisation d’aspirateurs à filtration absolue (HEPA), le port d’EPI adaptés et la mise en place de confinements partiels lorsque nécessaire
Rédaction du dossier de consultation des entreprises (DCE)
Le DCE inclut toutes les informations nécessaires pour permettre aux entreprises de soumissionner de manière éclairée et précise. Il doit préciser :
- La nature des matériaux amiantés, en indiquant clairement les quantités, les localisations exactes ainsi que les types de matériaux contenant de l’amiante (par exemple, flocages, calorifuges, dalles de sol).
- Les travaux à réaliser, en détaillant chaque étape des opérations, les procédures spécifiques à suivre ainsi que les délais prévisionnels pour chaque phase des travaux.
- Les exigences en matière de moyens humains et techniques, comme le niveau de formation des travailleurs (SS3 ou SS4), mais également la certification des entreprises, les qualifications spécifiques des opérateurs et les équipements nécessaires, tels que les dispositifs de protection individuelle et les systèmes de confinement à utiliser.
Un DCE bien rédigé garantit des offres conformes à vos attentes, facilite la comparaison des propositions des entreprises et assure une meilleure préparation des travaux en toute sécurité.
En ajoutant des détails précis sur les contraintes du chantier, les modalités de gestion des déchets amiantés et les exigences de coordination entre les différents intervenants, le DCE permet d’éviter des imprécisions qui pourraient générer des surcoûts ou des non-conformités durant l’exécution des travaux.
Évaluation des offres
Lors de l’évaluation des offres, vérifiez attentivement les critères suivants :
- Les qualifications des entreprises : Assurez-vous que l’entreprise dispose des certifications amiante nécessaires ainsi que de la formation adéquate des salariés. Ces qualifications doivent inclure des attestations de formation récentes, des compétences à jour et la validation de capacité à intervenir sur des chantiers amiantés. Cela garantit que les travailleurs sont préparés pour intervenir en toute sécurité.
- Les méthodologies proposées : Étudiez les méthodologies et les étapes de retrait détaillées. Les plans doivent inclure des mesures précises pour la réduction de l’empoussièrement, les confinements ainsi que les procédures d’évacuation des déchets amiantés. Une planification rigoureuse prévient les incidents et garantit une bonne exécution.
- Les équipements de protection et les mesures de sécurité détaillées : Assurez-vous que l’entreprise dispose des EPI appropriés, notamment des combinaisons jetables, des masques respiratoires conformes aux normes en vigueur (type FFP3 ou équivalent) et des dispositifs de confinement étanches. Vérifiez la présence de systèmes d’aspiration à filtration absolue et de mesures de décontamination.
- Les moyens humains et la logistique : Assurez-vous que l’entreprise est en mesure de mobiliser une équipe suffisante et qualifiée pour respecter les délais prévus et qu’elle dispose de la logistique nécessaire pour mener à bien le chantier. Cela inclut également la gestion des déchets amiantés, la mise en place de zones de décontamination et la présence d’un encadrement technique compétent sur place.
Privilégiez une entreprise avec une expérience confirmée et des références solides, qui peut prouver ses compétences sur des chantiers similaires. La consultation des avis de précédents clients ainsi que la vérification des études de cas ou des réalisations passées, sont de bons indicateurs pour valider la fiabilité de l’entreprise.
Une bonne entreprise proposera des solutions adaptées et personnalisées en fonction des contraintes spécifiques du chantier.
Mesures d’empoussièrement
Il est essentiel de veiller à ce que des mesures d’empoussièrement soient mises en place et réalisées tout au long des travaux. Ces mesures ont pour objectif de vérifier l’absence de pollution de l’environnement proche pendant toute la durée des interventions.
Les prélèvements doivent être effectués régulièrement pour garantir que les fibres d’amiante ne se dispersent pas au-delà de la zone de travail. Certaines de ces mesures sont obligatoires dans le cadre des travaux de sous-section 3, qui concernent les opérations de retrait ou de traitement de l’amiante (par exemple, lors d’un chantier de désamiantage complet).
En sous-section 4, qui concerne des interventions plus limitées, il est préconisé d’inclure ces mesures d’empoussièrement dans le contrat liant le donneur d’ordre à l’entreprise de travaux. Cette précaution contribue à prévenir tout risque sanitaire et à s’assurer que les conditions de travail restent conformes aux normes de sécurité en vigueur.
Les mesures doivent être bien documentées et archivées afin de pouvoir démontrer la conformité des opérations en cas de contrôle réglementaire.
Mesures de fin de travaux
Une fois les travaux terminés :
- Contrôle visuel : Vérifiez l’absence de débris visibles. Ce contrôle doit être effectué minutieusement, en inspectant toutes les surfaces de la zone de travail, y compris les coins difficiles d’accès, pour garantir qu’aucun résidu d’amiante n’est resté sur place. En cas de doute, un nettoyage supplémentaire peut être nécessaire avant de poursuivre.
- Mesures d’empoussièrement : Faites analyser l’air pour s’assurer que les fibres sont en dessous des seuils réglementaires (5 f/l). Ces mesures doivent être réalisées par un laboratoire agréé, qui utilisera des méthodes validées pour mesurer la concentration des fibres dans l’air. Des prélèvements doivent être effectués à différents endroits de la zone de travail pour assurer une représentativité maximale des résultats.
- Levée de confinement : Remplis uniquement après validation des contrôles. La levée de confinement consiste à démonter les installations de confinement (barrières, systèmes de dépression) et ne peut être effectuée qu’une fois tous les tests concluants. Cette étape doit être planifiée avec soin afin de minimiser la dispersion de poussières résiduelles. Il est recommandé de procéder avec précaution pour éviter toute recontamination de l’environnement.
Un certificat de restitution de la zone peut être délivré, attestant que les contrôles de fin de travaux ont été réalisés avec succès et que la zone est désormais sans danger. Ce certificat doit être archivé et communiqué aux parties prenantes, y compris aux occupants potentiels de la zone pour garantir la transparence et la traçabilité des opérations.
La traçabilité des opérations
Toutes les étapes doivent être documentées de manière précise et exhaustive. Cela inclut :
- Rapport de fin de travaux : Ce rapport doit comporter le plan de localisation de l’amiante mis à jour, détaillant les zones où des matériaux ont été retirés et confirmant l’absence d’amiante résiduel. Il doit également inclure des photographies avant et après les travaux, les résultats des contrôles visuels et des mesures d’empoussièrement ainsi que les actions correctives éventuellement réalisées.
- Les bordereaux de suivi des déchets amiantés : Ces bordereaux doivent indiquer clairement la quantité de déchets, leur nature, les lieux de stockage temporaire et les centres de traitement agréés vers lesquels ils ont été acheminés. Chaque bordereau doit être signé par toutes les parties impliquées, afin de garantir une traçabilité sans faille des déchets jusqu’à leur élimination finale.
- Journal de chantier : Le journal de chantier doit consigner toutes les étapes du chantier, incluant les mesures de sécurité mises en place, les conditions météorologiques et les éventuels incidents survenus. Cette documentation contribue à démontrer la bonne gestion des risques tout au long des travaux.
La traçabilité est essentielle pour prouver la conformité en cas de contrôle, mais également pour assurer la transparence vis-à-vis des parties prenantes et garantir la sécurité des intervenants ainsi que des occupants futurs.
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